Le gouvernement fédéral est confronté à un énorme défi budgétaire. Diverses mesures ont été envisagées, telles que la réforme fiscale tant attendue, l’indispensable réforme des pensions, la baisse de la TVA sur les fruits et légumes pour encourager les habitudes alimentaires saines – tout en ignorant si cela aura un effet réel sur le prix final pour les consommateurs -, la baisse de la TVA sur l’énergie pour maintenir les factures à un niveau abordable pour la population, et ainsi de suite. Cependant, toutes ces mesures doivent être « neutres sur le plan budgétaire » et donc compensées par des économies ou de nouvelles recettes. Comme toujours, l’on espère beaucoup de l’augmentation des recettes provenant des accises sur les produits du tabac. 

La question est de savoir si le gouvernement se rend compte que le citron de la taxation du tabac a été complètement pressé. Quelques chiffres : 

  • Les recettes provenant des accises et de la TVA sur les produits du tabac ont été inférieures de 128 millions d’euros en 2022 par rapport à 2021. Cependant, une nouvelle augmentation importante des accises a été introduite en 2022. Le fait que, malgré les augmentations des accises, les recettes soient toujours inférieures indique que de plus en plus de consommateurs belges achètent leurs cigarettes et leur tabac à rouler de moins en moins par le biais des circuits commerciaux normaux, légaux, dans le pays. 
  • L’étude la plus récente (février 2023) d’une étude longitudinale (depuis 2007) montre qu’une cigarette sur cinq consommée en Belgique n’a pas été achetée en Belgique et ne génère donc pas de recettes d’accises pour le budget. La grande majorité de ces cigarettes ont été importées (illégalement) de pays où les cigarettes sont nettement moins chères en raison de taux d’accises moins élevés. Il s’agit principalement de la Bulgarie, de la Turquie et de la Roumanie. En conséquence, le fisc belge perd environ 845 millions d’euros de recettes. 
  • L’augmentation du commerce illicite des produits du tabac est également confirmée par les saisies record successives de cigarettes illégales dans notre pays. En 2021, le nombre de cigarettes illégales saisies a représenté 158 millions d’euros de recettes fiscales. En 2020, ce chiffre n’était que de 49 millions. Les chiffres définitifs pour 2022 n’ont pas encore été publiés, mais en août 2022, le compteur affichait déjà 139 millions de pertes de recettes. Malgré que les services douaniers soient de plus en plus performants, il est à craindre que les cigarettes illégales saisies ne soient que la partie émergée de l’iceberg. 
  • Avec une nouvelle augmentation importante des droits d’accises en janvier – pour la troisième année consécutive – le gouvernement compte à nouveau sur une forte augmentation des recettes du tabac pour 2023. Cela semble peu réaliste. En 2023, les accises (minimales) sur les cigarettes sont déjà supérieures de 36,5 % à celles de 2020, et celles sur le tabac à rouler de 64,6 %. Il n’est donc pas surprenant que, dans les conditions économiques actuelles, les fumeurs se tournent vers d’autres alternatives moins chères. 

Cimabel, la fédération belgo-luxembourgeoise des fabricants de cigarettes, en appelle au gouvernement fédéral de ne pas procéder à de nouvelles augmentations des accises sur les produits du tabac. Les dernières années ont montré que les augmentations drastiques ont eu un effet contraire, alors que le pourcentage de fumeurs en 2022 reste au même niveau qu’avant Covid (24 %), selon la Fondation contre le cancer. 

Il est grand temps de repenser l’ensemble de la politique du tabac et de se concentrer sur des innovations nettement moins nocives pour les fumeurs, comme l’e-cigarette, les produits du tabac chauffés et les sachets de nicotine. Des pays comme la Nouvelle-Zélande, le Japon et la Suède montrent clairement que des progrès sans précédent peuvent être réalisés grâce à ces innovations dans la lutte contre les effets nocifs du tabagisme. Pourtant, le monde politique belge ignore encore totalement ces innovations. L’annonce d’une augmentation des recettes par le biais d’une hausse des accises sur le tabac, sous le couvert d’une politique anti-tabac forte, peut encore sembler acceptable à la tribune, mais il s’agit plus que jamais d’une tromperie manifeste à l’égard du parlement, des contribuables et des électeurs. 

Tenez-vous au courant de nos activités et autres nouvelles en nous suivant sur Twitter.